LA FORMULE DE LA FIA POUR UNE MOBILITÉ DURABLE : ENTRETIEN AVEC THIERRY WILLEMARCK, VICE-PRÉSIDENT DE L’ENTITÉ MOBILITÉ
Entretien avec Thierry Willemarck, Vice-président de la FIA pour la Mobilité, publié dans le quotidien The Urban Mobility.
Comme la version actuelle de l'automobile est souvent perçue comme allant à l'encontre des objectifs de d’écologie et de durabilité, que fait la fia pour les inclure dans la nécessaire transition vers une énergie propre ?
La FIA est convaincue que le rôle des consommateurs est essentiel dans la transition vers une mobilité plus durable. Les questions de qualité de l'air et d’embouteillages en environnement urbain étant au cœur du problème, il est essentiel que nous gardions à l'esprit les besoins des usagers de la route, tout en préservant la cohérence des politiques aux niveaux national et local.
Dans la mesure du possible, nous devons faciliter les décisions en veillant à ce que les consommateurs disposent d'informations claires et fiables sur l'impact environnemental de leurs choix. C'est pourquoi la FIA et son réseau de 145 clubs à travers le monde lancent des initiatives pour aider les décideurs à concevoir des politiques inclusives et équitables, pour permettre aux consommateurs d’être mieux informées sur leurs choix de mobilité et leur impact environnemental.
L'une de vos principales initiatives étant la sécurité routière, comment envisagez-vous un avenir plus sûr, compte tenu de l'émergence de tant de nouveaux modes de transport (voitures traditionnelles, autobus, scooters, vélos, véhicules autonomes, scooters, etc.) sur la route ?
De nouvelles formes de mobilité apparaissent, apportant de nouvelles opportunités, mais aussi de nouveaux défis en termes de sécurité, notamment au niveau urbain. Nous devons encourager les autorités municipales à adopter l'approche ‘Vision Zéro’ afin de prévenir tous les accidents de la route mortels et les blessures graves. La Vision Zéro est un processus continu et exigeant, mais il s'est avéré efficace et applicable en pratique dans des villes de toutes dimensions et régions géographiques.
La ville de New York, qui est devenue la première ville américaine à adopter cette stratégie en 2014, est un parfait exemple de la mise en œuvre réussie de la stratégie Vision Zéro. Depuis, le nombre de décès sur les routes de la ville a diminué de 28 %, avec une baisse de 45 % du nombre de piétons tués. Cela montre que la sécurité routière dans un environnement urbain peut être améliorée avec un bon ensemble de mesures politiques, même dans une ville complexe.
Aussi, les mesures de sécurité routière doivent être innovantes. Sans de nouvelles technologies visant à améliorer les performances mondiales en matière de sécurité routière, il sera difficile d'atteindre l’objectif de zéro décès. Les nouvelles solutions d'aide à la conduite, les fonctions automatisées, les capteurs et autres éléments connectés devront d’abord passer des tests rigoureux avant d’être mis sur le marché grand public. Les technologies fiables sont un outil puissant pour rendre nos routes et nos véhicules plus sûrs et plus inclusifs.
Pourquoi est-il important pour la FIA de s'associer à Autonomy cette année ?
Autonomie est une plate-forme pertinente qui montre comment les modèles et les besoins de mobilité évoluent. Pour la FIA, il est important de participer à ce processus, en contribuant à accélérer l'adoption de solutions de mobilité urbaine intelligentes et durables, mais aussi en apportant notre point de vue critique sur les solutions qui ne nous convainquent pas, ou qui ne semblent tout simplement pas suffisamment sûres.
Vous avez récemment lancé l'initiative Smart Cities de la FIA en 2017. Pouvez-vous décrire brièvement le programme et citer ses principaux succès et défis rencontrés après sa première année ?
Les villes du monde entier sont en train de repenser leurs politiques urbaines en se concentrant sur la durabilité et la mobilité, qui jouent un rôle central dans ce processus.
L'initiative Smart Cities de la FIA s'articule autour du Championnat de Formule E ABB FIA. Cela permet de montrer comment la technologie et l'innovation dans le sport automobile peuvent améliorer efficacement la mobilité dans les villes. Réunissant des experts de la mobilité, des autorités municipales, des organisations internationales de transport, des prestataires de services, des innovateurs urbains mondiaux et des experts en recherche et développement, cette initiative vise à aider les villes à définir de nouveaux modèles de mobilité urbaine durable et sûre. Des forums ont déjà eu lieu à Mexico, Berlin, Montréal, Paris, Santiago, Rome et Zurich, et bientôt l'Asie en 2019.
Le programme comprend également un Smart Cities Startup Challenge, pour identifier, sélectionner et soutenir de nouvelles idées et solutions susceptibles d'améliorer la qualité de la mobilité, dont certaines seront présentées à Autonomy, et une récompense Smart Cities, pour démontrer que les villes peuvent réellement concevoir des politiques innovantes ou mettre en œuvre des services innovants pour la mobilité sans nécessairement pénaliser les usagers.
Au cours de la troisième saison du programme, nous continuerons à renforcer notre coopération avec les acteurs concernés par les domaines de la mobilité tels que l'autonomie, afin d'assurer la pérennité des évènements organisés dans les villes hôtes des courses de Formule E.
Quels sont, selon vous, les principaux problèmes de mobilité urbaine et comment la FIA s'efforce-t-elle de les résoudre ?
Notre principale préoccupation reste la sécurité, et la FIA continuera à travailler avec les autorités municipales et toutes les parties prenantes pour sensibiliser l'opinion à l'importance de rendre les rues plus sûres, et pour concevoir des programmes visant à réduire le nombre de décès parmi les usagers vulnérables. La campagne mondiale de sécurité routière #3500lives, déployée dans 900 villes ; l'initiative Safe City Street en coopération avec l'International Transport Forum ; le programme Start Rating for School, en coopération avec l'International Road Assessment Programme ; les nombreux projets mis en œuvre dans les villes grâce à nos Clubs membres, par le biais du Programme FIA de subventions de sécurité routière. Ce n'est là qu'une partie de notre travail au niveau sécurité urbaine.
Notre objectif global est d'assurer l'accès à des solutions de mobilité sûres, durables et abordables. Dans cette perspective, la qualité de l'air et la gestion du trafic sont des priorités pour la FIA et ses clubs membres, et nous nous engageons à débloquer des solutions à la fois techniques et politiques pour améliorer les systèmes de mobilité urbaine. L'une des initiatives concrètes dans ce domaine est notre programme de test de performance environnementale des véhicules - un programme de test indépendant effectué auprès des consommateurs, qui mesure efficacement les gaz d'échappement des véhicules. Les résultats réels des performances des véhicules aident à mieux équiper les clubs FIA et les organisations partenaires pour encourager les constructeurs à améliorer les performances environnementales de leurs véhicules, et à guider les consommateurs dans l'identification du choix le plus "vert" selon leurs besoins.
Pouvez-vous expliquer les principes de conception universelle en matière de mobilité et pourquoi ils sont importants pour un avenir durable ?
La conception universelle est un pas en avant pour rendre les systèmes de mobilité plus inclusifs. Les avantages des systèmes de transport conçus de manière inclusive vont bien au-delà du simple respect des lois et règlements, car l'amélioration de l'accès aux transports intègre tous les usagers dans l'écosystème de la mobilité d'une manière équitable et pratique.
On associe souvent ‘les transports accessibles’ à des véhicules accessibles, conçus pour répondre aux besoins des personnes handicapées et âgées. Toutefois, les véhicules améliorés avec les solutions de conception universelle ne devraient pas faire l'objet d'une publicité spécifique pour les personnes handicapées. Elles se positionneront comme modes de transport apportant des améliorations pour tout le monde.
Cependant, la conception universelle devrait être intégrée plus globalement dans le contexte urbain, dans les réseaux d'autobus et de trains, les trottoirs, les passages à niveau et les attractions touristiques.
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Interview réalisée par Anne Gadel, Responsable des Affaires Publiques chez Autonomy Paris